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Homme à barbe et femme à poils


Bibliographie société

vs

 

Entre discrimination islamophobe et injonction sociale, deux histoires de pilosité dérangeante, avec une barbe et des poils d’aisselles.

On parle souvent des cheveux longs, courts, crépus, lissés, cachés, voilés, dressés en crête ou de couleur, parce qu’ils sont affaire de morale autant que de politique ou de religion.
Pour autant, les poils sont-ils des cheveux comme les autres ?

A Strasbourg, pendant une représentation de Werther de Massenet, les aisselles de Bérénice, actrice et figurante ponctuelle, ont occupé les équipes de l’Opéra dérangés par ses poils jugés inconvenants.
Toutes les filles de l’atelier maquillage cherchaient comment faire pour planquer mes poils d’aisselles.

Pour la première fois de sa vie, la barbe d’Amine lui posé problème dans le cadre professionnel : à Bordeaux, on a refusé de l’embaucher comme vendeur dans une galerie marchande, sous prétexte qu’il pourrait faire peur aux clients et inquiéter les agents de sécurité de la grand distribution.

Il y a aussi les poils pubiens dans l’Antiquité égyptienne, rasés pour des raisons d’hygiène, mais que les nobles reproduisent grâce à un postiche, afin de se « distinguer »  du reste de la population. Il y a encore la barbe des Russes que Pierre le Grand souhaitait faire couper à la mode occidentale. Il y a, enfin, plus près de nous, les poils des jambes de la top model Arvida Byström et qui divisent les partisans et les opposants. Ou comment prendre les conventions à rebrousse-poil…

France Culture

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Petites culottes en trompe-l'oeil


 

Les images d’une collection de vêtements circule actuellement sur Internet, notamment par mail. Elles présentent des jupes arborant des fessiers de femmes en trompe-l’oeil, qui selon les commentaires accompagnent les clichés « font fureur au Japon ».
Lire la suite… Zigonet

 

Deux artistes finlandais Nutty Tarts proposent trois modèles de sous vêtements poilus.
Lire la suite… Oser être soi

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La haine du poil


à Juliette
à Agnès Maillard


L’Origine du monde 1866

Affiche autrichienne 2006

Les femmes, qui se rasent les poils pubiens, croient le faire en toute liberté et certaines même acquérir ainsi plus de liberté. Paradoxe de notre époque où règne la novlangue orwellienne selon laquelle la soumission est la liberté et vice-et-versa. Or, nos comportements mêmes les plus intimes sont soumis, consciemment ou inconsciemment et que le voulions ou non, à la pression de la société dans laquelle nous vivons [1].

Nous pourrions écrire l’histoire de la chasse au poil :
Le poil masculin est connoté positivement : la force, la virilité et le pouvoir. Le récit biblique fait le récit de la vie de Samson, héros légendaire dont la force venait de sa longue chevelure. A contrario, la coupe des cheveux est imposée aux esclaves, aux prisonniers, aux bagnards, aux déportés, aux moines et aux militaires.
Le poil féminin est connoté négativement : arme de séduction qu’il convient de cacher. Les traditions religieuses judéo-chétienne et musulmane imposent aux femmes le voile des cheveux et des rites de purification, l’épilation voire le rasage des poils pubiens. A contrario, le récit évangélique fait le récit de Marie-Madeleine, la prostituée aux cheveux longs, qui devint disciple de Jésus de Nazareth ; lors de la Libération en 1944 des femmes, qui avaient pratiqué la collaboration horizontale, furent tondues [2].

Nous pourrions faire l’étude linguistique de la chasse au poil. Noter, par exemple, que l’expression politiquement correct « épilation du maillot » remplace systématiquement « épilation des poils pubiens » (qui dépassent du maillot). Cette incapacité à nommer la chose est significative.

Nous pourrions aussi ironiser sur le fait que certaines, qui s’indignent de la coutume musulmane du voile, pratiquent allègrement la coutume musulmane de l’épilation totale. Cette contradiction s’explique par la logique de la transparence, qui s’apparente en l’occurence à l’exhibitionnisme.

La critique militante de la chasse au poil est écrite par le Mouvement International pour une Écologie Libidinale. Notre critique se situe en amont des pratiques individuelles et donc au niveau où s’élabore les normes de comportement.

Pendant des siècles et encore aujourd’hui dans certaines aires culturelles, les comportements humains étaient réglés par l’idéologie religieuse. Aujourd’hui, la publicité remplit la fonction de normalisation sociale. Elle s’accommode de toutes les idéologies quelles soient religieuses ou politiques et sociales car elle a aussi marchandisé les idéologies.

La publicité sut faire la preuve de sa capacité infinie de mettre à son service ce qui semblait la nier le plus radicalement. Comment s’en étonner puisque ses valeurs et son langage semblent accordés à des sociétés où toute chose se nomme produit, où tout produit vise un marché ; où toute création nouvelle est lancé et où le marketing est roi.
AKOUN André, Société et publicité in POIRIER Jean (sous la direction de), Histoire des mœurs II vol.1, Folio Gallimard, 1991 p.497.

L’article le plus pertinent sur la « philosophie » de la publicité est ancien, mais toujours d’actualité.

[…] la publicité, explicitement et implicitement, comporte une axiologie, un système de valeurs, d’attitudes éthiques, économiques et esthétiques qui caractérisent «notre» modèle de civilisation.
Certes, la publicité en soi ne postule l’adhésion a aucune idéologie. […]
Pourtant la publicité est normative : elle pose, expose, impose une nouvelle table de valeurs, un style de vie, des modèles de comportement. Elle dit […] comment il convient de vivre et d’être, comment «on» s’habille et «on» se déshabille, comment «on» travaille et «on» s’amuse, comment «on» sera éternellement jeune, aimé, heureux.
QUESNEL Louis, La publicité et sa « philosophie » in Les mythes de la publicité Communications n°17, 1971 p. 56 à 66.

Alors que les idéologies religieuses ou politiques cherchaient à imposer un comportement en persécutant les opposants, la publicité joue sur les interactions sociales de la mode : se donner une image (positive) de soi par la possession et l’ostentation d’objets qui manifestent l’appartenance à un groupe [3]. Ainsi, la femme qui se veut libre doit se conformer aux habitus du club des femmes libres tels que les décrivent les publicitaires, notamment dans les publi-reportages des magazines féminins.

La publicité prend appui sur les individus pour, de proche en proche, imposer un comportement de consommation au plus grand nombre. Pas à tous, mais elle s’en moque car les rebelles à un comportement donné adhéreront à un autre dont elle a le produit comme réponse. Ainsi la norme des sites pornographiques est d’afficher des sexes rasés (féminins et masculins), mais il existe aussi une catégorie hairy. 4 010 000 de sites sont consacrés aux « poilues » et 1 110 000 aux « poilus », surnom donné aux soldats français pendant la Première Guerre mondiale pour vanter leur virilité guerrière.

03/07/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
Dossier documentaire Corps, Monde en Question.
Dossier documentaire Sexualité, Monde en Question.
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[1] Georges Orwell :
• ORWELL Georges, La ferme des animaux [1945], Folio Gallimard, 1984 [Texte en ligne].
• ORWELL Georges, 1984 [1948], Folio Gallimard, 1972 [Texte en ligne].
Soumission librement consentie :
• BEAUVOIS Jean-Léon et JOULE Robert-Vincent, Soumission et idéologies – Psychosociologie de la rationalisation, PUF, 1981.
• BEAUVOIS Jean-Léon, Traité de la servitude libérale – Analyse de la soumission, Dunod, 1994.
• BEAUVOIS Jean-Léon et JOULE Robert-Vincent, La soumission librement consentie – Comment amener les gens à faire librement ce qu’ils doivent faire ?, PUF, 1998.
• LA BOETIE Etienne de, Discours de la servitude volontaire [1576], Flammarion, 1993 – Mille et une nuits, 1997 – Payot, 2002 [Texte en ligne]
• MILGRAM Stanley, Soumission à l’autorité [1974], Calman-Lévy, 1994.
[2] Symbolique de la pilosité :
• CAZENAVE Michel (sous la direction de), Encyclopédie des symboles, Pochothèque Livre de Poche, 1996 p.132 et 133.
• CHEVALIER Jean et GHEERBRANT Alain, Dictionnaire des symboles, Bouquins Robert Laffont, 1982 p.234 à 237.
Le poil au masculin :
Les Francs, tout comme leurs rois, portent les cheveux longs […]. Les esclaves et les membres du clergé, en revanche, doivent être tondus […]. Le symbolisme est évident : les cheveux longs signifient force, virilité et liberté.
ARiÈS Philippe et DUBY Georges (sous la direction de), Histoire de la vie privée – 1. De l’Empire romain à l’an mil, Seuil, 1985 p.456.
Récit biblique de Samson : Lire la Bible
Le poil au féminin :
En Orient, la légende raconte que la reine de Saba, marchant sur des miroirs qu’elle aurait confondu avec de l’eau, releva un jour le bas de sa robe devant le roi Salomon qui s’exclama alors : « le poil est l’ornement de l’homme, il défigure la femme ». Le mythe [de l’épilation à l’orientale] était né. Il faudra ensuite attendre l’issue des croisades chrétiennes du Moyen Âge, qui auront lieu entre le XIe et le XIIIe siècles après J-C, pour que l’épilation à l’orientale gagne progressivement toutes les cours d’Europe.
Le portail de l’épilation
Chez Mondeville (XIVe siècle), le monde des femmes s’active et se transmet recettes de séduction, épilatoires diverses (chaux vive, arrachage du poil avec des pinces, à l’aide des doigts trempés dans de la poix, ou encore – œuvre de patience – aiguilles chaudes enfoncées dans le bulbe pileux), pratiques qu’il semble préférable de ne pas mentionner, fût-ce dans l’intimité conjugale.
ARiÈS Philippe et DUBY Georges (sous la direction de), Histoire de la vie privée – 2. De l’Europe féodale à la Renaissance, Seuil, 1985 p.358, 359.
Les années 1980 à nos jours termineront d’achever cette renaissance de l’épilation-Reine, avec la montée en puissance des médias, télévision et presse magazine en tête avant l’avènement d’Internet. Ces supports de communication de masse vont imposer à leur tour de nouveaux codes sociaux dans la société occidentale, évolution qui ira de pair avec une profonde révolution des mœurs : les canons de beauté s’orientent de plus en plus vers des mannequins féminins aux corps d’adolescentes, imberbes et de plus en plus dénudées ; le port du string se généralise progressivement pour devenir aujourd’hui le sous-vêtement le féminin le plus porté et le plus vendu, notamment auprès des jeunes générations ; la pornographie pénètre dans tous les foyers grâce à la vidéo et aux chaînes privées, imposant par la même occasion l’épilation intégrale en véritable référent de la séduction sexuelle ; enfin, le culte du corps, porté de concert par une culture homosexuelle en plein essor autant que par le développement du sport-spectacle, fera considérablement évoluer le rapport au corps des hommes, en le décomplexant et en le magnifiant.
HUGONET Diane, L’histoire de l’épilation, Knol Google, 25/07/2008.
Rites de purification :
Une analyse détaillée du vocabulaire se référant à des activités de toilette permet de dégager plusieurs remarques. L’ensemble des termes exprimant ces activités de toilette ont une origine religieuse [rituel de purification].
POIRIER Jean (sous la direction de), Histoire des mœurs I vol.1, Folio Gallimard, 1990 p.602.
Dans l’aire juive, la toilette corporelle et la bain purificateur sont dictés par le code religieux mosaïque qui influença de tout temps les mœurs des Juifs, mais également [les mœurs des musulmans].
POIRIER Jean (sous la direction de), Histoire des mœurs I vol.1, Folio Gallimard, 1990 p.632.
Le respect de l’hygiène corporelle et des rituels de purification juifs a influencé les règles de vie des musulmans qui eux-mêmes allaient influencer les traditions méditerranéennes [chrétiennes] à partir du VIIe siècle.
POIRIER Jean (sous la direction de), Histoire des mœurs I vol.1, Folio Gallimard, 1990 p.634.
La femme musulmane est semblable aux Grecques et aux Romaines qui épilaient la totalité de leurs corps.
POIRIER Jean (sous la direction de), Histoire des mœurs I vol.1, Folio Gallimard, 1990 p.636.
Récit évangélique de Marie-Madeleine : Bible Service
[3] Thorstein Veblen, économiste et sociologue américain, a écrit :
Aucune classe de la société, même si elle trouve dans la pauvreté la plus abjecte, ne s’interdit toute habitude de consommation ostentatoire. On ne renonce aux tout derniers articles de cette catégorie que sous l’empire de la plus implacable nécessité. On souffrira la crasse et l’inconfort avant de se défaire du dernier affiquet, avant de dire adieu à tout simulacre de décence.
VEBLEN Thorstein, Théorie de la classe de loisir [1899], TEL Galimard, 1970 p.57 [Texte en lignePrésentation de la théorie de la classe de loisirVeblen : un précurseur].
Lire aussi :
• BOURDIEU Pierre, La Distinction – Critique sociale du jugement, Minuit, 1979 [Fiche de lectureAnalyse par R. WAAST].
• HERPIN Nicolas, Sociologie de la consommation, La Découverte, 2001 [Fiche de lectureNote de lecture].

La tyrannie de l’épilation


L’épilation est-elle naturelle ?

Parmi les jeunes femmes que nous interrogeons sur leur pratique épilatoire, il s’en trouve pour nous dire qu' »il est naturel de s’épiler », que « le poil ce n’est pas la nature de la femme » ou même que « le poil est contre-nature » ou que « un corps épilé est totalement en harmonie avec la nature ». Ceci peut paraître parfaitement absurde. Ces phrases ne font sens que si l’idée de nature renvoie, non pas à la nature biologique, mais à la nature version publicitaire. C’est-à-dire le naturel vu comme « manière d’être » (« personnalité »). Bref à l’idée de nature telle qu’elle est véhiculée dans l’idéologie individualiste. Mais après tout, l’humain étant un être culturel, sa « nature » ne saurait se définir indépendamment de tout ancrage culturel. Et lorsque l’on remet en cause l’universalité de la pratique de l’épilation, c’est alors (paradoxalement ?) sa dimension culturelle qui est avancée par les femmes interrogées comme argument légitimant.

L’épilation est-elle culturelle ?

Or qu’est-ce que la culture ? C’est ce qui permet l’humanisation. La culture naît de l’intersubjectivité, c’est à dire de l’interaction entre sujets, entre personnes. Ce partage permet la construction d’un système de significations communes. C’est la condition de l’émergence d’un imaginaire social, sans lequel aucun lien n’est possible. A l’inverse, des croyances, des valeurs ou des comportements qui sont diffusés à partir d’une source et qui se répandent par l’imitation, ne constituent pas de la culture. Les media de masse, contrôlés par le grand capital, ne produisent pas de culture ; ils en détruisent plutôt, en divertissant et en véhiculant le mépris de la culture. « La culture est une résistance au divertissement » écrivait Pier Paolo Pasolini. Et l’histoire naît de la création permanente de culture.

La norme du glabre (il ne faut pas montrer de poil) est l’exemple d’un ensemble de croyances (« le poil c’est sale »), de valeurs (« le poil c’est laid ») et de comportements (couper, arracher, ou au minimum cacher ses poils) qui s’est imposé, au fil des dernières décennies, à partir des images médiatiques répétées à l’infini. Les hommes et les femmes qui s’épilent et pensent le faire par « choix personnel », ne nous disent pas qu’être lisse c’est beau et propre, ils/elles disent que « c’est esthétique et hygiénique ». Des mots qui n’appartiennent pas à la langue populaire mais au discours pseudo-scientifique des magazines.

L’épilation contemporaine n’est ni naturelle ni culturelle, elle est idéologique

Dans le présent contexte d’une épilation généralisée (au moins en ce qui concerne les femmes pour l’instant), justifiée par une idéologie individualiste (« c’est mon choix personnel »), laquelle produit le plus grand conformisme (c’est le même « choix » pour presque toutes), conserver ses poils naturels, les assumer – c’est à dire ne pas les dissimuler – ne peut tenir que d’un acte de résistance. En effet, la femme qui conserve ses poils et ne les cache pas résiste à la pression sociale et à la normalisation médiatique. Et cela exige d’être capable de supporter la réprobation sociale. C’est un acte politique. Cette résistance est permise par la rencontre entre les gens (on ne résiste pas longtemps seul). Elle naît et se propage dans les interactions de personnes capables de penser et d’agir par elles-mêmes (des sujets). « Créer, c’est résister. Résister, c’est créer. » (Appel du Conseil National de la Résistance). Résister ensemble – en l’occurrence à la norme de l’épilation -, c’est créer de la culture. C’est faire l’histoire, c’est construire l’humanité.

L’opposition entre nature et culture est factice. Le poil est à la fois naturel et culturel

Face à l’idéal du corps-machine, inaltérable, lisse et aseptisé, que véhicule l’idéologie dominante dans ses magazines et sa pornographie, nous revendiquons notre humanité, c’est-à-dire tout à la fois notre nature biologique (nos poils, nos odeurs, nos rides…) et le sens que nous lui donnons. Car dans le contexte actuel, être poilu a du sens. Ce sens, que nous créons collectivement, construit la culture. Nous cultivons la nature. Par un processus inverse l’épilation, en se présentant comme une évidence, naturalise (transforme un arbitraire social en nécessité naturelle). Et ce faisant elle détruit la culture et ne crée que de l’idéologie.

L’été sans épilation, M.I.E.L.

Lire aussi :
• DA SILVA Jean, Du velu au lisse – Histoire et esthétique de l’épilation intime, Complexe, 2009.

Pratique discrète, l’épilation génitale passe pour fort répandue aujourd’hui tant pour les femmes que pour les hommes. Présentée souvent comme une mode, elle possède des vocations multiples : identitaires, philosophiques, éthiques, religieuses, professionnelles.

Dans cette étude très documentée et menée avec alacrité, Jean Da Silva restitue toute la complexité de ce fait de société en le situant dans la perspective d’une histoire qui remonte au début du XXe siècle, mais aussi bien au-delà.

Il revient sur certains a priori concernant ce traitement particulier d’une zone corporelle intime et montre qu’il intéresse des mondes aussi divers que l’avant-garde artistique des années 1920, le naturisme d’après guerre, les cultures méditerranéennes, le fondamentalisme islamiste, la sexualité récréative japonaise, la pornographie, la mode, l’art contemporain, les conduites exploratoires homo ou hétérosexuelle.

Il s’attache aussi à l’hostilité que l’épilation pubienne ou axillaire a pu rencontrer. Cette approche tant historique qu’esthétique trace ainsi un chemin de traverse, inattendu et singulier, dans l’histoire récente de la sexualité.

• MONESTIER Martin, Les Poils – Histoire et bizarreries des cheveux, toisons, coiffeurs, moustaches, barbes, chauves, rasés, albinos…, Le Cherche midi, 2002.

Les poils se développent chez l’homme différemment selon les parties du corps. Depuis les origines du monde, ils interfèrent sans discontinuer dans tous les rapports humains, amoureux, sexuels, superstitieux, médicaux, pénaux, commerciaux et religieux. Dans la majorité des pays occidentaux, il existe plus de coiffeurs que de boulangeries, et plus de centres de traitement du poil que de cordonneries.

À l’heure actuelle, plus de 35 millions de personnes – dont 12 millions de coiffeurs – vivent et œuvrent dans le monde pour et à travers le poil. Tantôt courts, fins, lisses et droits, tantôt longs, épais, bouclés, la production de poils, leur emplacement, leur appellation, leur utilité, leur symbolisme, diffèrent selon les ethnies et les sexes. Signes de virilité, de sagesse, de raffinement ici, ils sont ailleurs stigmates de soumission, de traîtrise, de démonialité.

Reines du XIXe siècle, des milliers de femmes à barbe contemporaines subissent l’ostracisme du monde du travail et se tournent de plus en plus vers les tribunaux. Alors que les chauves se remémorent tristement la fuite de leurs poils capillaires, d’autres se font « raser » pour souscrire au diktat de la mode, ou encore pour « couper l’herbe sous le pied des poux, des morpions et des champignons ».

Les collectionneurs de poils plongent quelquefois dans la délinquance pour obtenir une « pièce rare ». Les fétichistes poussent les femmes à se raser le pubis, tandis que d’autres achètent des perruques et des moumoutes pour aisselles et pubis.

Le poil a été à l’origine de plusieurs guerres et de maintes rebellions. Indics de toutes les polices, ils se « mettent régulièrement à table » pour désigner les criminels, les violeurs, et les champions sportifs « truqueurs ». Imputrescibles, les « poils du passé » aident à la résolution d’énigmes historiques.

Objet d’un trafic, au même titre que les cigarettes ou les objets d’art, les poils ont chaque année leur heure de gloire avec le « championnat international des barbus et chevelus » où s’affrontent les plus belles pilosités de la planète.

• ZWANG Gérard, Éloge du con – Défense et illustration du sexe féminin, La Musardine, 2001.

Cet Eloge du con, compilation d’articles écrits pour les Cahiers de Sexologie clinique, est une synthèse des principaux thèmes chers au docteur Zwang en même temps qu’un vibrant plaidoyer pour ce que François Mauriac nommait « l’ignoble petit mot de trois lettres ».

Le premier texte, par un détour lexicologique, montre l’universelle dépréciation de la désignation du sexe féminin (source inépuisable d’injures, telle « n’être qu’un con ») comparée aux flatteuses appellations du sexe viril. Dans les textes qui suivent, Zwang se fait l’apôtre d’une « esthétique vulvaire », redonne toute son importance (et sa place) au clitoris, s’insurge contre la mode de l’épilation et nous parle gravement de la sodomie.

Sans pédanterie, dans un style flamboyant, avec une grande culture et une passion communicative, parfois polémique mais certainement démystificateur, Zwang nous donne à voir le sexe féminin sous un éclairage inédit.

Dossier documentaire & Bibliographie Corps, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Sexualité, Monde en Question.