Monde en Question

Analyse de l'actualité économique, politique et sociale dans le monde

Archives Journalières: 16/07/2009

Résistant sous la burqa


L’émotion suscitée par l’apparition de silhouettes en burqa dans le domaine public en France me remet en mémoire l’odyssée d’un de mes anciens collègues aujourd’hui décédé.

Patriote et refusant la défaite de juin 1940, il décida de rejoindre le général de Gaulle et les Forces françaises libres en Angleterre, ce qu’il accomplit après (…) la traversée de l’Espagne et le franchissement de la frontière en Afrique du Nord entre l’enclave espagnole et le Maroc, d’où finalement il réussit à rejoindre l’Angleterre.

Ce dernier obstacle il le franchit affublé d’une burqa, déguisé en épouse musulmane du guide arabe qui l’assistait dans son évasion. Personne n’aurait pensé, ni osé aller vérifier ce qui se cachait réellement sous ce rituel vêtement.

L’ironie dans cette affaire est que le fugitif était juif. Incorporé dans les Forces aériennes françaises libres, il servit comme mitrailleur arrière dans les raids sur l’Allemagne. Fait avéré ou légende, je ne sais, mais selon certains, c’était dans l’appareil piloté par Romain Gary, avec Mendès-France comme navigateur.

Roger Lacrouts
Tribune de Genève

Lire aussi : La croisade de Gerin contre la burqa : une aubaine pour la droite, La Riposte.

Voile sur la cagoule


Le 29 octobre 1793 fut publié le décret relatif aux vêtements des personnes des deux sexes :

Art. 1er. Nulle personne de l’un et de l’autre sexe ne pourra contraindre aucun citoyen ni citoyenne à se vêtir d’une manière particulière sous peine d’être considérée et traitée comme suspecte et poursuivie comme perturbateur du repos public. Chacun est libre de porter tel vêtement et ajustement de son sexe que bon lui semble.
Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlemens avis du Conseil d’état

Le 19 juin 2009 fut publié le décret relatif à l’incrimination de dissimulation illicite du visage à l’occasion de manifestations sur la voie publique :

Art. R.645-14. Est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe [1.500 euros] le fait pour une personne, au sein ou aux abords immédiats d’une manifestation sur la voie publique, de dissimuler volontairement son visage afin de ne pas être identifiée dans des circonstances faisant craindre des atteintes à l’ordre public.
La récidive de la contravention prévue au présent article est réprimée conformément aux articles 132-11 et 132-15 [3.000 euros, en cas de récidive dans un délai d’un an].
Journal officiel

L’initiative du député communiste André Gerin est venue à point pour couvrir d’un voile pudique ce décret liberticide publié dans un silence assourdissant…

À propos de ce bout de tissu, qui excite tant les hommes que certains sont prêts à tuer pour dévoiler une femme, il convient de rappeler des faits historiques :

Des trois grandes religions monothéistes, le christianisme a été la première à imposer le voile aux femmes en avançant des arguments strictement religieux, c’est-à-dire en incluant le voile dans une démonstration théologique. Dans les écritures monothéistes – la Bible hébraïque, le Nouveau Testament et le Coran – seule la première lettre de Paul aux Corinthiens (11/2-16) justifie le port du voile par les femmes en l’appliquant aux rapports qu’ont les hommes et les femmes à Dieu. L’intérêt particulier de ce texte est d’avoir généré tout un discours sur la tenue des femmes et de leur avoir durablement imposé de se couvrir la tête dans tout le monde chrétien alors que le voile des femmes n’était auparavant qu’une pièce de vêtement d’origine païenne localisée dans les villes des pourtours de la Méditerranée aussi bien en Occident qu’en Orient. À la fin du XXe siècle, dans les pays méditerranéens, en Europe du Sud et en Orient chrétien, ainsi que chez les religieuses des trois grandes confessions chrétiennes, les femmes portent encore souvent un voile ou un foulard.
Rosine LAMBIN, « Paul et le voile des femmes », Femmes et Religions, Clio, numéro 2-1995.

Serge LEFORT
16/07/2009

Crimes de guerre de Tsahal à Gaza


Des soldats de Tsahal parlent d’une guerre sans retenue à Gaza, Reuters-Yahoo! Actualités.

Accusé par Amnesty International, Human Rights Watch et l’Onu d’avoir causé des pertes civiles et des destructions injustifiables en décembre et janvier dans la bande de Gaza, l’Etat d’Israël a toujours rejeté ces mises en cause.

Plusieurs soldats de Tsahal ayant participé à cette opération affirment à présent que leurs chefs militaires les ont incités à tirer d’abord et à se préoccuper ensuite de distinguer les combattants des civils.

En conséquence, témoignent-ils, leurs forces se sont ruées dans le territoire enclavé sans retenir leurs tirs.

Selon ces trente soldats, dont les témoignages anonymes ont été recueillis par l’ONG « Breaking the Silence », la priorité de l’armée était de minimiser ses pertes afin de s’assurer du soutien populaire israélien à l’opération.

« Mieux vaut atteindre un innocent qu’hésiter à viser un ennemi »: c’est en ces termes qu’un soldat résume la façon dont il a compris les instructions répétées durant les briefings préliminaires et durant l’intervention, qui a duré 22 jours, du 27 décembre 2008 au 18 janvier 2009.

« Dans le doute, tuez. La puissance de feu était insensée. On arrivait et les explosions étaient hallucinantes. Dès l’instant où on arrivait à nos positions, on commençait à tirer sur tout ce qui était suspect », raconte un autre.

L’objectif annoncé de l’opération « Plomb Durci » était de mettre fin aux tirs de roquettes des activistes islamistes du Hamas vers le sud d’Israël.

Selon une ONG palestinienne, le bilan des combats côté palestinien s’établit à 1.417 tués, dont 926 civils. L’armée israélienne parle de 1.166 morts dont 295 civils. Côté israélien, dix soldats et trois civils ont péri.

Des rues entières de Gaza ont été rasées pour réduire le risque des tireurs embusqués et des pièges explosifs. Selon les Nations unies, les quelque 600.000 tonnes de gravats commencent à peine à être déblayées, six mois après la fin de l’opération.

L’armée israélienne, qui repose essentiellement sur la conscription, interdit formellement à ses soldats de parler aux médias. Le rapport de 112 pages de « Breaking the Silence » contient le témoignage de trente soldats « ayant servi dans tous les services impliqués dans l’intervention ».

« La majorité (…) sont encore en service dans leurs unités et, profondément alarmés par la dégradation morale des Forces de défense israéliennes (FDI), se sont tournés vers nous. (Leurs témoignages) suffisent à mettre en doute la crédibilité de la version officielle de l’armée », peut-on lire dans ce document.

Dans un communiqué, l’armée israélienne rejette ces critiques, qu’elle estime « basées sur des on-dit », mais s’engage à enquêter en cas de plainte formelle pour exactions, tout en assurant que ses soldats ont respecté le droit international durant « des combats complexes et difficiles ».

A l’exception d’un sergent prénommé Amir, l’ensemble des soldats parlent sous anonymat, et leurs visages sont floutés dans les témoignages filmés. La transcription des propos est disponible sur le site Breaking the Silence.

L’ONG indique disposer de financements de la part d’associations israéliennes de défense des droits de l’homme ainsi que des gouvernements britannique, néerlandais et espagnol et de l’Union européenne.

Plusieurs soldats décrivent une procédure de fouille de maisons où des civils étaient forcés à entrer dans des bâtiments suspects devant les soldats. Ils citent plusieurs cas dans lesquels des civils devaient s’avancer tandis qu’un militaire, derrière lui, reposait son fusil sur son épaule.

Le rapport évoque également l’emploi sans discernement de munitions incendiaires au phosphore blanc dans les rues de Gaza -ce que Tsahal dément-, des « destructions massives ne répondant à aucune menace directe » et des règles d’engagement « permissives ».

« On ne nous disait pas de tirer sur tout ce qui bouge. Mais la consigne générale était: si vous vous sentez menacés, tirez. Ils n’arrêtaient pas de nous dire que c’était la guerre et qu’à la guerre, on fait feu à volonté », se souvient un soldat.

Pour priver les combattants du Hamas d’abris, des secteurs entiers, comprenant parfois des jardins et des vergers, ont été rasés par bombardements, tirs d’artillerie, explosifs et bulldozers.

« Nous n’avons pas vu une seule maison intacte (…). Les infrastructures, les chemins, les champs, les routes, tout était en ruines. Les (bulldozers) D-9 avaient tout écrasé », raconte un militaire.

Dans le préambule du rapport, « Breaking the Silence » affirme que l’armée israélienne s’efforce de prouver que si des exactions ont été commises à Gaza, elles étaient le fait de « soldats isolés ».

Mais ce témoignage suggère que « le coup violent et sans précédent porté aux infrastructures et aux civils de la bande de Gaza est le résultat direct de la politique des FDI ».

Tsahal a utilisé des Gazaouis comme boucliers humains, accusent des soldats israéliens, AP-Yahoo! Actualités.

Les soldats israéliens ont utilisé des civils palestiniens comme boucliers humains durant leur offensive dans la Bande de Gaza et ont eu la gâchette facile, causant des morts injustifiées, selon les témoignages publiés mercredi de soldats ayant participé à l’opération « Plomb durci ». L’armée parle de calomnie.

« Parfois, les militaires entraient dans une maison en plaçant le canon de leur fusil sur l’épaule d’un civil et ils avançaient en l’utilisant comme bouclier humain. Les commandants disaient que c’étaient les instructions et que nous devions le faire », a rapporté un soldat.

Ce témoignage corrobore ceux collectés par Amnesty International sur place, selon lesquels les membres de Tsahal ont utilisé des Palestiniens comme boucliers humains pour inspecter des lieux ou des objets qu’ils soupçonnaient d’être piégés. Une enquête de l’ONU est en cours.

Alors que Tsahal affirme n’avoir eu recours au phosphore blanc que pour éclairer le ciel ou créer des rideaux de fumée, un autre soldat affirme que des obus contenant cette substance ont été utilisés pour mettre le feu à une maison suspectée d’abriter des armes. « La maison est partie en fumée », a-t-il déclaré à l’association Shovrim Shtika/Breaking the Silence (« Briser le silence »), qui publie le rapport.

Cette organisation de réservistes a été créée en 2004 pour recueillir les témoignages des militaires qui avaient servi en Cisjordanie durant la Deuxième Intifada. Elle a déjà publié plusieurs ouvrages, notamment sur Hébron.

Le fascicule paru mercredi rassemble les témoignages de 26 soldats ayant participé à l’opération « Plomb durci » (27 décembre 2008-18 janvier 2009). Leur identité n’est pas révélée pour les protéger de toutes représailles mais ils seraient « heureux de témoigner » si une enquête formelle était lancée, assure Breaking the Silence.

Presque tous ces militaires estiment que Tsahal a utilisé une force disproportionnée dans la Bande de Gaza. Ils s’interrogent notamment sur l’usage d’artillerie lourde dans des zones densément peuplées.

« Il n’y avait pas besoin d’utiliser des armes comme les mortiers, comme le phosphore », considère l’un d’eux. « J’ai l’impression que Tsahal cherchait une occasion de montrer sa force. »

L’armée israélienne, qui tient le Hamas pour responsable de la plupart des morts de la guerre à Gaza, accuse Breaking the Silence de « diffamation ». Elle souligne que les informations contenues dans le fascicule ne peuvent être vérifiées car les témoignages sont anonymes et les détails ont été effacés. Elle exhorte les soldats ayant des doléances de ce type à déposer plainte officiellement.

Lire aussi :
• Israeli soldiers talk about the occupied territories, Breaking the Silence
• Dossier documentaire & Bibliographie Résistance à la colonisation de la Palestine
• Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël